J’avais trainé dans ce bar pendant plusieurs heures, à boire et à regarder le basket à la télé. J’avais grignoté quelques cacahuètes et fait le point sur ma vie pourrie. Je ne savais pas communiquer avec les gens, j’avais toujours besoin de provoquer, de me battre et surtout d’insulter. Je me cachais derrière ma violence lorsque je me sentais perdu et effrayé. J’avais balancé mon prof devant tout le monde, sans scrupule et je ne me sentais même pas coupable. Je savais qu’il était gay, je l’avais remarqué à force de l’observer. Je me disais que tout le monde devait être au courant, alors que ce n’était pas grave de le crier au milieu du couloir. En voyant sa tête, je m’étais dit que finalement, il avait tenté de le cacher. J’avais toujours de nombreux avertissements, mais mon père avait assez d’argent pour que je ne me fasse pas renvoyer. Ce n’était pas juste, mais c’était ça, le pouvoir de l’argent. Je payais mes provocations à coup de pieds et à coup de poings.
Au final, j’étais seul. Je n’avais personne avec qui passer du temps, avec qui me laisser aller et rire de temps en temps. Parce que ce n’était pas ma réputation. Je n’étais qu’un sale con qui ne savait parler qu’avec ses poings. Je sortais du bar, fatigué par cette solitude que je provoquais. Je pouvais marcher droit et mes idées étaient plus ou moins claires, alors c’était que je n’avais pas trop bu. Je marchais sans but, profitant de ce petit vent frais qui caressait mes joues. J’adorais passer mes nuits dehors, à observer les lumières de la ville. Je trainais jusqu’à ce que mon regard se pose sur lui. J’arrivais à le reconnaitre facilement à force de le voir à l’université. Je m’approchais aussi discrètement possible de lui.
«Salut prof ! »
Mon haleine puait sûrement la vodka, mais je m’en foutais. J’avais enfin trouvé une occupation. J’avais du mal à le considérer comme mon professeur, pour moi il avait plutôt l’air d’un élève. Je ne l’avais jamais entendu hausser le ton et je me demandais s’il avait une once d’autorité en lui. Je lui offrais un de mes sourires de petit merdeux.
«Il est tard non ? Vous êtes à la recherche d’un petit mec à vous taper ? »
Je ne savais pas pourquoi j’avais autant de problème avec sa sexualité. Je ne connaissais même pas la mienne, ou du moins, je n’étais pas encore prêt à l’accepter. J’avais ce besoin viscérale de m’engueuler et ce soir, je l’avais choisi. Il devait m’en vouloir, alors j’attendais de découvrir son côté obscur. J’avais du mal à croire qu’il soit aussi doux qu’il le laissait paraître et j’avais envie de le pousser à bout. Je me demandais s’il avait quelqu’un dans sa vie. Je me faisais un peu trop curieux, mais je me posais pas mal de questions sur lui.
«Personne ne vous attend à la maison ? »
Je croisais les bras, je n’avais pas envie de me battre avec mon prof, ça sûrement pas. Je voulais simplement le provoquer comme je savais si bien le faire. Je voulais le faire réagir tout simplement. .